passage de baleines

Publié le par elizabeth971

J'ai vu des baleines, hier matin, alors que j'attendais mon bus. Le premier bus passe à 6 heures et le suivant, à 7 heures. Je prends celui de 7 heures. J'attends à l'arrêt du bus qui se trouve devant le point-de-vue principal de la commune. On est sur un haut de falaise qui surplombe la mer, à l'endroit où se rencontrent l'Océan Atlantique et la Mer des Caraïbes. A quatorze kilomètres (c'est tout près, quatorze kilomètres), se tiennent les îles Terre-de-Bas et Terre-de-Haut qui forment l'archipel des Saintes. Terre-de-Haut est un peu plus loin que Terre-de-Bas. Terre-de-Bas est connue pour être un lieu où se retrouvent les baleines à bosse (je crois que c'est ce type de baleine) pour la reproduction. C'est en mars - avril que passent les baleines dans cet endroit assez étroit mais très profond que l'on appelle le Canal des Saintes. J'ai assisté hier matin au passage de trois baleines. Je pouvais suivre leur itinéraire au jet d'eau qui signale leur présence.

Le mois d'avril est aussi depuis plusieurs années, le mois du Karujet, manifestation importante en Guadeloupe. C'est une course de scooters des mers. Une compétition bruyante qui attire tout ce qu'il y a de plus vulgaire, bruyant, voyant dans l'île et l'archipel. Le capitalisme se donne en spectacle dans son rôle le plus destructeur. C'est une compétition internationale qui amène des gens de l'extérieur, du monde entier, et qui, pendant une semaine ou deux, monopolise le regard du monde du sport mécanique de l'eau sur notre île.

Il y a quelques années, les associations de protection de la nature ont réussi à obtenir que les scooters ne dérangent pas les baleines qui sont de passage précisément à ce moment-là. L'étape des Saintes a donc été supprimée. Petite victoire sur le pouvoir de l'argent et de la vulgarité. D'accord, le sport qu'est le scooter des mers est certainement très agréable pour celui qui le pratique. Mais la compétition organisée sur notre île par des gens qui croient en des valeurs de rentabilité et de compétition en matière de spectacle médiatique, risque d'avoir des conséquences très négatives à long terme... ou à moyen terme ...ou même à court terme.

Aujourd'hui, à Notre-Dame des Landes, de l'autre coté de l'Océan, des gens dont les valeurs sont proches des miennes se battent contre les décisions du pouvoir. Nous savons que ce combat est inégal et que beaucoup de gens sincères dans leur activité d'agriculture et d'élevage sans pesticides et sans moyens financiers, vont perdre tout ce qu'ils ont. Combat inégal mais pas inutile. Beaucoup sont persuadés qu'au fond, ils ont raison. Au fond, ils représentent nos aspirations les plus profondes.

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D
Coucou. Je reprends le travail aujourd’hui après quelques vacances. J’ai lu ton texte il y a déjà un moment et ce dont je me rappelle c’est la vue des baleines. Je trouve cela tellement extraordinaire!!! Moi je ne pourrai jamais voir des baleines dans la nature, et c’est tout con, mais je crois que je serai aussi émerveillé qu’un enfant de 5 ans d’en voir en vrai. Peut-être même plus, en fait...Alors je me demande comment on peut être suffisamment con pour faire une course de scooter des mers au milieu des baleines plutôt que de les admirer. Le humains me déçoivent de plus en plus. Les gens me déçoivent de plus en plus. Je crois bien que je n’aime plus l’humanité, ni les êtres humains individuellement. Et je ne suis pas sûr que ce soit normal. La plupart d’entre sont inintéressant et me font chier au bout de 5 minutes. Et je m’aperçois que je suis bien plus heureux quand je suis seul. Peut-être devrais-je consulter, tu ne penses pas? On peut devenir autiste à 50 ans? Se sentir étranger, ou étrange tout court alors qu’on est parfaitement intégré socialement ? Mon côté sauvage qui ressort, un peu comme quand j’etais adolescent, pose des problèmes, je le vois bien, à mon entourage. Peut-être est-ce que je suis dépressif en fait. Tout simplement.
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E
Merci pour ta réponse. Je ne crois pas que tu sois dépressif parce que tu recherches la solitude. Je crois que l'humanité est en train de se séparer en deux parties comme dans Farenheit. Je le crois ou je l'espère. ou je le crois et l'espère. Je crois qu'en gros, il y a deux chemins possibles : d'un côté, celui de la foule des consommateurs jouisseurs qui ne peuvent trouver satisfaction que dans la comparaison et la multiplication des expériences de jouissance et d'un autre côté, les autres. Et parmi ces autres, il y a plusieurs groupes et parmi ces groupes, il y a celui des gens qui ont besoin de recul. ça ne veut pas dire une solitude permanente non plus. Sur mon chemin, pour aller au travail quand je descends du bus, je suis seule et j'apprécie cette solitude et je n'envie pas ceux qui sont dans l'embouteillage. Au travail, je suis souvent seule avec mes activités. Et en famille on peut vivre avec des membres de la famille tout en ayant de grands moments à soi comme moi quand je dessine ce que je vois dans le jardin ou toi quand tu es assis sur ta pierre méditative et que tu crées ton monde musical. Ce type de solitude est supposé nous protéger ou nous guérir de la dépression d'après ce que je lis dans mes livres destinés à me guérir de mes angoisses.<br /> Pour en revenir aux baleines, malheureusement, je ne les vois pas vraiment : je vois leur souffle qui indique leur présence et j'entrevois un mouvement de queue. Mais déjà, le fait de voir leur souffle est enthousiasmant. on espère voir la baleine (ou les baleines) et on imagine les groupes qui passent comme des trains, sous l'eau.
D
Test.
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E
Je ne voulais pas dire que tu n'es pas dépressif mais que la recherche de la solitude n'est ni la cause ni la conséquence du fait d'être dépressif, il me semble. La recherche de la solitude est un vrai sujet philosophique. Souvent, les gens qui courent en groupe, en Guadeloupe, courent en parlant (en criant même) car être en groupe et faire la conversation en même temps que le sport leur permet de se donner le courage de faire leur sport. Nous vivons en société. Nous sommes des animaux sociables. En même temps, nous avons besoin d'être seuls pour certaines activités mais pas trop longtemps. On voit bien ça, au bureau, l'alternance entre les moments où on travaille seul et ceux où on rend compte de notre travail en réunion. Certains sont tout le temps en réunion. Il y a un équilibre à trouver. Il faut ajouter également le fait que la société actuelle nous conditionne à ne pas être seuls ou à l'être sans l'être ou bien à se dire que si on est seul c'est que personne ne veut de nous. Toute cette analyse que tu fais sur ta solitude est intéressante. Tu as 50 ans. Les gens qui ont entre 30 et 40 ans peuvent avoir une autre expérience, une autre analyse de la solitude. Ce sont les "geek" qui apparaissent dans la génération juste après toi. et les plus jeunes ont encore un autre conditionnement.<br /> Merci pour ce que tu me dis à la fin. Je peux dire la même chose. D'ailleurs tu vois bien que tu es mon seul lecteur fidèle.
D
Je trouve quand même ça étrange, même si tu as raison je ne suis pas dépressif. En fait, j’ai l’impression de revenir en arrière quand j’étais étudiant. Que je lisais des livres que les étudiants normaux ne lisaient pas. Que j’ecoutais des musiques que les étudiants normaux n’ecoutaient pas. Que je ne sortais pas en boite de nuit car je préférais passer une soirée à boire et refaire le monde. Que je ne me tapais du coup aucune nana. Et que paradoxalement j’étais fier de tout ça. Là j’ecoutre France Culture. Je lis le Monde Diplomatique. Je ne vote plus. Je n’écoute à nouveau plus que des musiques que je suis seul au monde, ou presque, à connaître. Tout ce que mon prof me fait découvrir en fait. Tout cela fait que je suis totalement décalé. Et tu vois, là je rentre de réunion, et je trouve que pratiquement tous mes collègues sont d’une bêtise affligeante. Quand on me parle de RTL, des Grosses têtes, de TF1, tu as regardé la télé hier soir? Non. Cela fait des années que je n’ai pas allumé une télé dans un hôtel. Alors, je fais un petit effort pour ne pas leur dire que je les trouve stupides et j’essaie de faire bonne figure. Dans ces moments là, j’ai l’impression de vivre dans un monde parallèle et je pense que j’aimerais mieux nager avec tes baleines au milieu de l’océan. Cela ne me fait pas souffrir, ni ne me rend triste. Juste un peu misanthrope. Je me rappelle ce que me disait ma psychologue, que j’avais dû être un enfant précoce. Le 6 mai, je vais avoir 50 ans et malgré ça, je crois bien que je suis toujours un enfant précoce...désolé si j’ai fait des fautes d’orthographe ou de frappe, j’écris depuis mon I-pad. Je t’embrasse. <br /> <br /> PS: toi, ma Lectrice, tu fais partie des gens que j’estime beaucoup. Depuis qu’on se connaît. Et c’est toujours le cas.