impressions, soleil en haut
vendredi
Il fait beau aujourd'hui, plein soleil et les feuilles des arbres brillent. Elles bougent aussi parce qu'il y a du vent. L'arbre à pain, mon bel arbre à pain qui a fait pousser tant de branches et de fruits en direction de notre maison me fait de la peine. Beaucoup de ses fruits sont mûrs et les gens le malmènent pour les récolter. Ils le malmènent aussi parce qu'une fois que les fruits sont cueillis, les branches basses cessent d'avoir un intérêt : elles frôlent les voitures qui passent en dessous alors on les arrache. Il me semble les avoir toutes vues pousser les unes après les autres pendant toute la période où je dessinais l'arbre à pain : de décembre à mars. Je ne peux plus le dessiner à présent car une branche que je commence à dessiner aujourd'hui sera peut-être arrachée demain et je ne pourrai pas finir mon dessin.
Derrière l'arbre à pain, il y a le manguier. Ce manguier est, paraît-il, celui où toute la commune venait se servir autrefois. Il portait les meilleures mangues greffées (mangues « Julie ») de toute la commune. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Qu'est ce qui n'est plus le cas ? Est ce qu'il ne porte plus de mangues ou est ce qu'il ne porte plus de mangues « Julie » ? Je ne sais plus très bien. En fait, je croyais qu'il était à moitié mort et que, pour cette raison, il ne portait plus de fruits. Mais voilà qu'il se met à fleurir depuis quelques jours alors que tous les autres manguiers du quartier ressemblent à des arbres de noël avec leurs mangues qui pendent au bout de leurs longues tiges et brillent au soleil comme des boules dorées.
Il a beaucoup de retard. Ses fleurs ressemblent à des grappes et elles surmontent
les feuilles qui se transforment : elles cessent d'être vertes et dures pour devenir rouges et souples. Elles ont l'air très douces.
Le flamboyant est tout nu. Il a perdu toutes ses feuilles comme un arbre en hiver.
À Gourbeyre, les flamboyants, qui sont bien feuillus, eux, commencent déjà à être rouges.
Celui de notre jardin a quelques pousses vertes sur son tronc nu et quatre ou cinq fleurs bien rouges mais petites.
Je m'intéresse beaucoup aux livres qui parlent de l'enfer et du paradis. À ceux qui expliquent que l'enfer et le paradis existent dans la vie ici-bas et que, sans affirmer qu'il existe une vie après la mort, si par hasard il y en avait une, il se pourrait qu'après la mort, on passe directement au paradis si on a su faire de sa vie un paradis (un peu le contraire de ce que nous dit notre religion). Mais comment faire de sa vie un paradis ?
Je crois que le paradis, pour moi, ressemble aux arbres. En tout cas, qu'il a un rapport avec les arbres.
C'est comme ça que je peux justifier le temps que je passe à dessiner des arbres. La question qui se pose alors est : est-ce le moment pendant lequel je dessine les arbres qui représente pour moi le paradis ou bien le résultat de mon dessin ? On pourrait dire que si j'ai atteint le paradis (ne serait-ce qu'un instant) pendant le moment où je dessinais mes arbres, il est probable que je pourrai retrouver une partie de ce paradis dans le résultat de mon dessin.
Je peux dessiner des tas de choses. Je peux faire un portrait. Sera-t-il ressemblant ? Oui et non. Et s'il n'est pas ressemblant, aura-t-il quand même un intérêt ? Je ne sais pas.
Ce que je ne sais pas faire, c'est faire un dessin d'imagination. L'imagination pure existe-t-elle vraiment ? N'est-elle pas toujours liée à des souvenirs d'images ? Et l'imagination serait-elle alors la façon dont on assemble des éléments d'images dans un ordre qui peut être hasardeux ? Je n'arrive pas vraiment à répondre à cette question. J'ai donc renoncé totalement à l'idée que je devais chercher des trucs dans mon imagination pour les dessiner.
Dans « Dessiner grâce au cerveau droit », un des livres de base de mes recherches philosophiques, Betty Edward nous explique que si nous arrivons vraiment à connecter notre cerveau droit, nous parviendrons en même temps à dessiner quelque chose de ressemblant et quelque chose qui nous est propre, qui vient de notre âme. Je dois dire que ce langage me semble plus clair que celui des gens qui essaient de justifier leurs dessins bizarres en disant que ça vient de leur imagination.
J'aime bien dessiner des arbres. Je mets du temps à les dessiner parce que je veux dessiner des branches et des feuilles et bien mettre tout ça en bon ordre, comme je les vois. J'essaie de les voir. Les voir, oui, c'est facile. Mais telles qu'elles sont vraiment, ces branches et ces feuilles...Pas si simple.
Bibliographie :
Livre cité dans mon article :
Dessiner grâce au cerveau droit / Betty Edwards
Autres livres sur ce sujet :
Libérez votre créativité / Julia Cameron
Le ciel et l'enfer / Aldous Huxley
Les pouvoirs de la nature / Charly Samson (Mary, ce livre pourrait t'intéresser car il y est beaucoup question des dolmens en Bretagne)