la vie sans voiture

Publié le par elizabeth971

Depuis le 3 janvier de cette année, nous n’avons pas de voiture.

Mon doudou a écrasé sa jolie Golf et a perdu son permis pour six mois et nous avons eu beaucoup de chance que les dégâts n’aient pas été plus importants vu l’état dans lequel il était. Mon doudou est quelqu’un d’une grande moralité. Il considère que les gens qui volent ou qui tuent ont leur place en prison mais lui, dès qu’il a bu, il adore conduire. Et si quelqu’un lui dit alors qu’il est dangereux de conduire quand on a bu car on peut avoir un accident et devenir un meurtrier, il affirme ne pas avoir bu une goutte d’alcool de la journée.

Les alcooliques sont toujours menteurs, surtout quand il s’agit d’alcool.

Car l’alcool -et surtout l’ivresse que procure l’alcool- est leur dernier refuge, leur liberté, leur coin de bien-être.

Le 3 janvier, mon doudou avait beaucoup bu, avant de prendre le volant. Il a eu son accident vers une heure de l’après-midi. Le soir, j’ai longtemps cherché le téléphone et l’ai finalement trouvé sous le lit mais lui, il était bien incapable de me donner le moindre indice pour que je retrouve ce téléphone.

Tard, le soir, il m’a demandé où j’avais mis les clés de sa voiture et je lui ai répondu qu’il n’en avait plus et qu’il n’en avait plus besoin parce qu’il n’avait plus de voiture. « Ah oui. » il a dit. « Mais j’ai besoin de cigarettes, il faut que j’aille en acheter. »

Alors on est sortis à pied, en direction de la boutique. Il était très tard et la boutique était fermée depuis des heures mais nous sommes quand même allés jusqu’à la boutique pour constater qu’elle était fermée. Il y a une seule boutique, dans la commune. Ce n’est pas une commune si petite que ce qu’on pourrait penser : il y a plus de 1500 habitants quand même. Mais il n’y a pas de magasin, ni de médecin, ni de boulangerie, ni de pharmacie, dans notre petite commune. Il y a des bars, trois restaurants (dont celui où nous et un autre couple sommes les seuls clients très réguliers) et la boutique. Certains bars fournissent des cigarettes mais nous ne sommes pas allés dans un bar pour en chercher. Je l’ai ramené à la maison et il a accepté de ne pas avoir de cigarettes.

La boutique que nous avons permet de ne pas manquer de l’essentiel. Nous y faisons quelques courses mais le moins possible car les prix sont très élevés. Mon doudou y achète son rhum quand je ne suis pas là pour le surveiller.

Depuis sept mois, nous faisons nos courses dans cette boutique et, quand quelqu’un veut bien me conduire en ville, je fais des courses en plus grande quantité dans un vrai magasin. C’est long, sept mois sans arriver à faire correctement ses courses. Pour ce qui est d’aller au travail, lui, il ne va plus au travail depuis longtemps alors ça ne le gène pas trop et moi, je fais une partie du trajet en bus ou en stop et une partie à pied. Mais là, depuis un mois, avec le chikoungounia qui m’a bousillé le tendon du genou gauche, je trouve ça dur de faire trois kilomètres à pied tous les matins pour aller au travail. Au retour, je marche aussi mais au retour, c’est moins dur parce que des collègues me ramènent jusqu’au carrefour et il me reste un kilomètre à faire à pied. En descente en plus, c'est plus facile.

Ce matin il pleuvait, c’était encore plus dur. Je me suis mise à penser à acheter une voiture. La plupart des gens doivent me trouver vraiment entêtée quand ils me voient continuer de marcher alors que je n’y arrive plus.

Acheter une voiture…

Je me suis dit « oui. J’achèterai une voiture si lui, il n’arrive vraiment pas à récupérer son permis de conduire mais seulement à cette condition-là. »

En août, si tout va bien, c’est-à- dire s’il parvient à aller à la commission médicale sans avoir touché au rhum (et ça devrait être le cas puisqu’il est convoqué à 8h30 et que les boutiques n’ouvrent que plus tard), il aura de nouveau son permis.

Il achètera une voiture.

J’espère qu’elle sera moins jolie que la Golf car ça m’a fait de la peine de voir le gâchis qu’il avait fait d’une aussi jolie voiture. J’espère surtout qu’il acceptera mes conseils quand je lui dirai de ne pas conduire s’il a bu. Est-ce qu’il aura « compris » ? C’est ce qu’on dit toujours dans ces cas-là.

La plupart des gens pensent que le fait d'avoir eu un accident permet à l'alcoolique de comprendre qu'il ne faut pas conduire quand on a bu. Mais un alcoolique ne « comprend » pas puisqu’il est toujours persuadé qu’il n’a pas bu.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article