2009 et ses conséquences

Publié le par elizabeth971

J'ai eu plusieurs fois la possibilité de quitter la Guadeloupe. Est-ce la Guadeloupe qui m'agace si fort ou est-ce autre chose ? Est-ce cette façon qu'ont les guadeloupéens de devenir de parfaits amoureux de la société de consommation : mode vestimentaire, téléphones les plus performants, voitures rutilantes,...

Quand je suis arrivée en Guadeloupe, il y a près de vingt ans, j'étais étonnée par le goût de luxe qu'on rencontrait partout. On me disait pourtant que les gens étaient pauvres, que les voitures de prix que l'on voyait circuler masquaient la misère réelle, que, parfois, on voyait des voitures magnifiques garées devant des taudis. Je n'en ai jamais vu. Sauf en photo, une photo des années 1980. Les taudis existent encore mais beaucoup moins que dans les années 1980. Après le cyclone Hugo, on a beaucoup reconstruit. La voiture de luxe garée devant un taudis fait partie des fantasmes de la Guadeloupe. Je n'ai toujours rien compris au comportement des guadeloupéens mais leur obsession de la société de consommation qui m'a tant choquée quand je suis arrivée ici, je la retrouve désormais partout. Dans ma Gironde aussi, on frime dans des quatre-quatre et les jeunes filles et jeunes femmes, perchées sur leurs talons aiguilles sont nombreuses à se prendre pour des mannequins. L'asservissement à la société de consommation, voilà ce qui m'agace le plus en Guadeloupe. Mais le même comportement a désormais pollué la planète.

Pourtant, il y a eu 2009 en Guadeloupe et c'est en 2009 que peut-être, j'aurais pu partir. Pour tous les guadeloupéens, l'année 2009 a marqué l'île par la longueur de la grève de janvier-février. Plus d'un mois. Presque deux. Grève générale : plus d'essence. Plus de nourriture dans les magasins. Des discussions à la télé sur les projets de société. Des mises en place de marchés vendant des produits (locaux) directement à la population, des discussions sur le transport en commun qu'on voulait voir fonctionner...enfin.. pour que les embouteillages et les gaspillages cessent.

J'aurais pu m'en aller à ce moment-là mais certains rêves m'ont attachée à la Guadeloupe : un changement de direction à mon travail qui pouvait peut-être annoncer une promotion (en réalité, j'ai été mise au placard) ? Un nouvel amoureux (j'essayais de ne pas m'apercevoir qu'il était alcoolique), mon implication dans une association d'écriture théâtrale. Tout ça est arrivé entre 2007 et 2010. J'ai eu, à ce moment-là, une réelle proposition pour retourner en France. Je ne l'ai pas acceptée. Je n'en ai plus jamais eu.

Pour en revenir à l'année 2009, il y a eu cette crise, donc, en Guadeloupe et on a pu espérer sortir du système de consommation qui éloignait la Guadeloupe de ses produits agricoles et la rendait de plus en plus dépendante de tout ce qui arrivait par containers : nourriture, matériel électroménager, voitures. Pendant plus d'un mois, on a imaginé une Guadeloupe différente, capable de fournir de la nourriture aux habitants, capable de se libérer de l'esclavage de la voiture grâce au développement des transports en commun.... Moins de gaspillage, moins de dépendance. Dix ans après, on est très loin de ce rêve. La Guadeloupe n'a pas acquis son indépendance alimentaire et les transports en commun n'ont pas conquis la population.

Pourtant, c'est bien à cette époque que j'ai laissé tomber la voiture. N'ayant plus d'enfant à emmener à l'école, je n'avais plus le même besoin d'une voiture. En plus, depuis 2009, le transport en commun se trouvait réellement mieux organisé à l'endroit où je vivais (il y avait donc eu un changement !) et puis, pour faire des courses alimentaires, il y avait la voiture de mon doudou qui s'avérait suffisante pour nos besoins à tous deux. Désormais, nous faisions courses communes, voiture commune et je me débrouillais pour faire les 9 km qui séparaient notre maison de mon travail en bus et à pied. Cette habitude de me déplacer en bus et à pied (il me reste deux kilomètres et demi à pied quand je descends du bus), je ne l'ai pas perdue. Cette marche presque quotidienne m'a éloignée de la société de consommation. Un petit peu.

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D
Je vais répondre à ton texte par une citation qui commence l’émission documentaire Les Pieds Sur Terre sur France Culture. Tu n’y trouveras peut-être aucun rapport, bizarrement moi j’en ai ressenti un tout de suite en lisant ton texte.<br /> « Personne ne sait ce qu’il se passe aujourd’hui car personne ne veut qu’il se passe quelque chose. En réalité on ne sait jamais ce qui se passe, on sait simplement ce qu’on veut qu’il se passe. Et c’est comme ça que les choses arrivent. »<br /> Et je rajouterai juste, ou pas.
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